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On ne trouvera pas ici tout ce que l'on peut dire sur l'économie et la politique de l'électricité, bien sûr ! Plan de cette note - Présentation générale Un marché concurrentiel ne peut pas conduire à l'optimum ; la solution la plus simple est l'acheteur-vendeur unique ; sous l'effet de multiples pressions, il a fallu ouvrir une partie du marché à la concurrence ; pour éviter le pire, la politique française de l'électricité ressemble de plus en plus à du bricolage ; la loi NOME en est le dernier avatar ; il ne faut pas trop la critiquer car c'est sans doute la moins mauvaise possible aujourd'hui. Il reste du travail à faire pour élaborer une efficace politique européenne ; celle-ci devra tenir compte des caractéristiques de l'électricité et des différences entre les Etats membres. - Une étude sur l'intérêt des interconnexions et d'un marché de l'électricté commun à deux pays dont les choix politques de production d'électricité sont très diférents : l'un de type français, l'autre de type allemand. - Le coût de production de l'électricité nucléaire : le rapport de la Cour des comptes de 2012 ; une évaluation du coût de production par un EPR, à partir des données du rapport de la Cour des comptes. Autres documents - Pour éponger les fluctuations de la production d'électricité éolienne et photovoltaïque, le chauffage hybride combinant électricité et fioul ou gaz - Une présentation simplifiée de l'économie de l'électricité : l'annexe 1 d'un rapport sur le prix de l'électricité publié par le ministère de l'industrie (2004). - Pourquoi la concurrence conduit à une sous-capacité nucléaire : annexe 4 du rapport sur le prix de l'électricité - La formation du prix de l'électricité : un rapport (2004) qui a été publié sur le site Internet du ministère de l'industrie. - "qui ne veut pas d'une augmentation de la capacité nucléaire ? D'étranges convergences" : un article paru dans la Revue de l'énergie - Présentation du rapport Champsaur, de 2009, et commentaires ; ce rapport a servi de base à la loi NOME (nouvelle organisation du marché de l'électricité). - La fiscalité de l'énergie : quatre sortes d'impôts pour quatre fonctions différentes : TVA, TIPP, taxe carbone et un impôt sur l'électricité. - Faites vous-même votre scénario - pour calculer la capacité nucléaire en fonction de vos propres hypothèses ; plusieurs tableaux cohérents de ressources et d'emplois de l'énergie - Une étude au crayon et à la gomme sur papier quadrillé de la contribution des éoliennes à la lutte contre les émissions de CO2 - février 2012 Voir aussi la place du nucléaire dans le scénario de référence. Extraits de Avec le nucléaire Dans "Trop de pétrole", un chapitre est consacré à l'électricité. |
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Les prix et les coûts d’électricité dans deux systèmes électriques très différents reliés entre eux dans la limite de la capacité des lignes d’interconnexion
Cette
étude porte sur la production d’électricité dans
deux zones, avec ou sans
production nucléaire, qui peuvent échanger de
l’électricité dans la limite de
la capacité d’interconnexion. Quelques-uns des résultats de cette
étude suggèrent quelques
politiques possibles selon que l’on donne ou non une priorité
à la consommation
du lieu de production, ou que l’on cherche à abaisser les prix
de vente ou à
faire financer les moyens de production par les ventes. Sans interconnexion, dans la zone avec
nucléaire où
la consommation est de 488 TWh hors pertes en ligne et où la
capacité nucléaire
est de 60 GW, les prix sur le marché sont bas : 64,9 €/MWh.
Les résultats
de la production nucléaire sont fortement négatifs :
un déficit de 6400
M€/an. Pour que le nucléaire soit
financé par le marché,
les prix devront être supérieurs. Le prix montera si toute
la production
nucléaire est destinée sans différenciation
à la consommation de Al et de Fr
dans la limite de la capacité de l’interconnexion. Si une
priorité est donnée à
la consommation de Fr, le prix augmente si quelques réacteurs
nucléaires sont
remplacés par des éoliennes et du photovoltaïque ou
encore si l’on ajoute à la
consommation finale de 488 TWh une consommation de 20 TWh pour produire
de
l’hydrogène. Si les
productions nucléaire, éolienne, photovoltaïque et
hydraulique sont proposées
également à la consommation de Fr et Al, les prix sur les
marchés Fr et Al se
rapprochent lorsque la capacité de l’interconnexion augmente et
sont égaux
lorsque celle-ci est de 12 GW. Les coûts de production restent
très différents. Les échanges d’électricité entre les deux zones permettent aussi de diminuer le besoin, dans chaque pays, de capacité de production « de pointe ». C’est un point important. Il est hors du champ de cette étude. |
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Voir aussi une
étude sur deux marches interconnectés |
Une étude réalisée en février 2023 compare un marché de type français et un marché de type allemand à un marché intégré "franco-allemand". Dans ce marché "intégré", les échanges entre la "France" et "l'Allemagne" ne sont pas limités par la capacité des lignes de transport d'électricité. Voir ici une présentation de cette étude et les principaux résultats. La plupart des hypothèses et des résultats se trouve ici sous forme de tableaux de nombres permettant de comparer les différents jeux d'hypothèses. On peut aussi voir une feuille 21*27 présentant toutes les hypothèses de capacité, de flux et de coût du cas "français" et et une autre celles du cas "franco-allemand". Les réultats sont extrêmement sensibles aux hypothèses. Avec les hypothèses retenues dans cette étude, dans un marché de type français le prix de l'électricité est très inférieur à ce qu'il est sur un marché intégré et les bénéfices de la production d'électricité nucléaire sont très supérieurs. Au total, les résultats économiques de l'intégration des marchés avantagent le pays qui refuse le nucléaire et désavantage celui qui l'accepte. Avec les hypothèses rentenues dans l'étude (dont un prix du gaz fossile de 60 €/MWh et un coût du nucléaire de 66 €/MWh), un marché intégré de l'électricité oblige l'ensemble des consommateurs et des producteurs du pays qui accepte le nucléaire à dépenser 5,5 milliards d'euros par an de plus par an que si le marché de l'électricité est national. C'est, pour ce pays, le coût de l'intégration des machés. D'autres hypothèses plausibles conduisent à un coût supérieur. L'intégration des marchés n'apporte donc aucun avantage économique au pays qui accepte le nucléaire. Un marché national peut respecter le principe de non discrimination en fonction de la nationalité ; alors, il n'est pas en contradiction avec le droit européen - voir ici. Par ailleurs, un marché national pourra être géré sans tenir compte des choix des autres pays, ce qui évitera de grosses difficultés. L'étude a été faite à l'aide d'une variante du logicel de simulation SimelSP3 (publié sur ce site) qui simule le fonctionnement d'un marché concurrentiel. Cette variante n'est pas encore publiée. |
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Présentation générale - Avec un parc de production optimal, les centrales nucléaires ne tournent qu'une partie du temps - Pour répondre aux pointes de consommation, la part du nucléaire, de l'hydraulique, des éoliennes - Faites vous-même votre simulation : Pour diviser les émissions par deux ou trois au moindre coût, de combien faut-il augmenter la capacité nucléaire ? - Un impôt sur l'électricité nucléaire ? - Les interconnexions ( lignes de transport transfontalières) : utilité et inconvénients Un système efficace qu'il a fallu démanteler partiellement La puissance appelée par la consommation
électrique varie
beaucoup entre les saisons et entre les heures de la journée et
l'électricité ne se stocke pas. Le parc optimal, celui
qui permet de répondre à la demande au moindre
coût, se calcule à partir de coûts fixes et
coûts variables des différents moyens de production.
Autre
caractéristique de l'économie de
l'électricité, les
investissements qui permettent d'avoir l'électricité la
moins chère sont très lourds et demandent une
compétence
technique et industrielle très spécifique :
l'électricité sera produite en grande partie par une
petit nombre d'entreprises très importantes, un oligopole - voir
les deux annexes au rapport sur la formation du prix de
l'électricité, la fiche 1
et la fiche 4.
L'ensemble de ces caractéristiques est tel qu'un marché concurrentiel ne peut pas conduire à l'optimum, c'est à dire répondre à la demande au meilleur coût. Il faudra une régulation très forte de l'Etat. La solution la plus simple est celle de l'acheteur-vendeur unique. D'un côté il achète des capacités de production et, de l'autre, il a le monopole de la vente d'électricité à des consommateurs individuels ou en gros. Il paie aux producteurs les frais fixes des capacités qu'il a achetées et les frais variables de production de l'électricité qu'il achète ; il vend à un prix qui oriente la demande de façon à utiliser au mieux les capacités de production, une tarification "à la Boiteux" dont EDF a une parfaite maîtrise. Mais pour des raisons plus idéologiques
qu'économiques, il a fallu ouvrir une partie du marché de
l'électricité à la concurrence. Les petits
consommateurs pourront continuer à acheter leur
électricité à un prix fixé par l'Etat, le
"tarif". Pour les autres, le prix est un prix de marché. Sur ce
marché concurrentiel, si la capacité nucléaire est
inférieure à l'optimum, les fournisseurs qui disposent
d'une capacité nucléaire réalisent de confortables
bénéfices (oligopole à la Cournot). Si ce
fournisseur est EDF, il utilisera sa marge pour financer des
installations nucléaires. Mais, sous la pression de la Commission, il a fallu obliger EDF à vendre aux enchères une partie de sa capacité de production à des fournisseurs d'électricité, sous forme de VPP, virtual power plant. Sur le marché concurrentiel, le prix de l'électricité sera calé sur le coût de production à partir de gaz ou de charbon, c'est à dire plus cher que le coût de production à partir de nucléaire. Le fournisseur qui achète de l'électricité nucléaire à son coût de production et revend sur le marché concurrentiel fera donc de grosses marges. Comme l'a montré le rapport sur la formation du prix de l'électricité, ce système de VPP permet aux acheteurs de VPP de recevoir eux-même une partie de la marge nucléaire et n'a aucun effet sur le prix de l'électricité. La loi
NOME, nouvelle organisation du marché de
l'électricité La loi NOME essaie d'éviter les défauts du
régime précédent. Tout d'abord, elle veut rendre
possible la concurrence sur le marché des petits consommateurs.
Pour cela elle oblige EDF à vendre une partie de son
électricité nucléaire (pouvant aller
sjusqu'à un quart de la production nucléaire) au prix de
revient. La loi
NOME, sans supprimer le tarif à la consommation finale, en
ajoute
donc un second, un tarif sortie centrale nucléaire.Si ces
fournisseurs vendent aux petits consommateurs, le prix
de l'électricité sera le même que celui de
l'électricité vendue par EDF. Rien à dire. Cela
pourra créer une concurrence sur les propositions commerciales
et stimuler l'inventivité pour combiner au mieux les
différentes formes d'énergie. Par ailleurs, concernant les ventes d'électricité sur le marché concurrentiel, la loi NOME a été conçue pour que le fournisseur soit incité à vendre son électricité sans faire de marge excessive. En effet la quantité d'électricité qu'il a le droit d'acheter à EDFà un bon prix dépend de sa part de marché en France. S'il fait une marge excessive, pensent les concepteurs de cette loi, un autre fournisseur proposera à ses clients un prix plus bas ce qui deminuera sa part de marché donc son droit à avoir de l'électricité nucléaire pas chère.Cela fonctionnera peut-être ainsi, mais on n'en est pas sûr et, de toute façon, c'est très compliqué. Harcelée par les diktats des ayatollah de la
concurrence, par la pression obstinée de fournisseurs plus
habiles
en lobbying et en finances qu'en savoir faire industriel, par la
logique de
concurrence commerciale et par la pression des opposants au
nucléaire
qui se combine avec celle des profiteurs qui tirent leur fortune des
prix de
reprise de l'électricité renouvelable - mais
conservant le
souvenir d'un passé récent très fécond et
efficace, avec un
monopole
de production électrique qui a permis à la France d'avoir
l'électricité
la moins chère et la moins polluante au monde (sauf les pays
fortement
dotés en électricité hydraulique), la politique de
l'électricité en France ressemble de plus en plus
à du bricolage. Comment faire autrement tant que l'on sera
obligé de faire semblant de croire que la création d'un
marché concurrentiel est une obligation quasiment sacrée ? La loi NOME, "nouvelle organisation du marché de
l'électricité", en est le dernier avatar. Il ne faut pas
trop
la critiquer. C'est probablement la moins mauvaise des politiques
possibles aujourd'hui. Tout dépend maintenant de la façon
dont elle sera mise en place : il faut que le tarif sortie centrale
reflète réllement non pas le coût comptable de
l'électricité nucléaire, mais le coût de
développement, c'est à dire le coût de
l'électricité qui sera produite par les futurs EPR.
D'aute part, si le prix de vente sur le marché concurrentiel
d'électricité nucléaire dégage une marge,
il faut que cette marge soit utilisée pour financer des
centrales nucléaires ou soit récupérée par
l'Etat sous forme d'un impôt. Mais ce serait
du gaspillage d'utiliser cet impôt pour financer des
éoliennes ou du photovoltaïque ! Et la loi NOME donne un délai pour refonder une
politique au niveau français et au niveau européen qui
tienne compte : La solution la plus
rationnelle est celle de
l'acheteur-vendeur unique sur une base géographique
homogène, c'est à dire une base nationale ou une base
couvrant plusieurs pays qui ont à peu près le
même équilibre de moyens de production. En ce qui concerne
la France,
ce sera une base nationale. Il y aura donc un tarif à la consommation finale et un
tarif sortie centrale. Le tarif sortie centrale sera applicable
à
toutes les centrales, anciennes ou nouvelles car il est justifié
non par le caractère "historique" des centrales mais par le
phénomène d'oligopole à la Cournot, qui vient de
ce que ces investissements sont extrêmement lourds et demandent
une très grande compétence industrielle. Sur ce
point, on peut relever une contraction dans le rapport Champsaur comme
je le montre dans ce texte
en note iii. En
réalité, un marché qui finance les frais variables
et fort mal les frais fixes et de nouvelles dispositions pour financer
les capacités de production. Le prix de l'électricité à la
bourse est le coût marginal de production du système,
c'est à dire le coût marginal de celui des moyens de
production en fonctionnement dont le coût marginal est le plus
élevé. Avec le développement des éoliennes
et panneaux photovoltaïques, PV, ce coût marginal est
souvent très bas, voire nul. Qui plus est, comme les
fluctuations du vent et du soleil peuvent être très
rapides, des productions d'électricité à partir de
centrales ou nucléaires ne vont pas arrêter leur
production alors même que la production totale dépasse les
besoins de la consommation. le prix de l'électricité
devient alors négatif,, l'électricité étant
acquise par des opérateurs qui peuvent la stocker. La nouvelle politique, qui ajoutera encore une
couche sur un dispositif réglementaire déjà assez
baroque, est d'instaurer des mécansimes de financement des
capacités de production. En France, en mars 2015 le
décret créant un marché de capcité a
été approuvé par le gouvernement. Il est copieux
de 150 pages !
La
coopération au sein de l'Union européenne Le mode de coopération au sein de l'Union
européenne doit respecter cette diversité et tenir compte
du fait qu'il s'agit d'une matière qui touche à la
sécurité publique et aux intérêts essentiels
de la nation. La coopération devrait donc ressembler à
une
coopération de type Schengen ou encore à la
coopération prévue dans le traité de Lisbonne pour
la fabrication d'armement ou les affaires militaires : une
coopérations structurée permanente. Le prix de l'électricité en France sera
inférieur au prix en vigueur
dans des pays où le coût de production est plus
élevé. Si l'on augmente la capacité des lignes de
transport internationales (interconnexions) , la tentation sera donc
extrêmement forte de vendre en France
l'électricité au prix en vigueur dans les pays voisins.
La capacité des interconnexions est aujourd'hui de 10 % de la
capacité
de production française ; c'est suffisant pour équilibrer
les pointes de consommation d'un pays à l'autre et pour
évacuer l'électricité de nos centrales
nucléaires lorsque la production est supérieure aux
besoins en France. On ne voit donc
pas de bonnes raisons d'augmenter cette capacité
d'interconnexion - voir plus de développement ici.
En
France : dans un parc optimal, les centrales nucléaires ne
tournent qu'une partie du temps En
simplifant, on peut dire que la puissance électrique
appelée
par la consommation est toujours supérieure à 40
milliards
de watt (GW, gigawatts) et que, une heure sur deux globalement
sur
l'année,
elle est supérieure à 50 GW ; pendant quelques heures
elle
dépasse 70 GW. On ne va pas faire une centrale nucléaire
pour tourner seulement quelques centaines d'heures par an,
évidemment
: pour répondre à la "pointe" de consommation, on utilise
des centrales au gaz, au charbon ou au fioul ; on procède aussi
à
des lâchers d'eau de barrage. Ecrit en 2004 : Ecrit en 2015 :
Certes, l'EPR coûtera plus cher que ce que
l'on prévoyait en 2004. Un EPR de série coûtera
sensiblement moins cher que le prototype de Flamanville dont la
durée de construction est au moins de quatre ans
supérieure à celle des deux EPR construits en Chine. Si
la durée de construction est inférieure de quatre ans,
rien que les intérêts intercalaires diminueront le
coût de 20 % environ. Néanmoins, si le prix du gaz reste
ce qu'il est en 2015 et si l'on ne se préoccupe pas d'effet de
serre, les futurs EPR coûteront plus cher que
l'électricité produite à partir de gaz. Mais si
l'on ajoute au prix du gaz un impot CO2 de 100 €/tCO2, l'EPR de
série sera préférable à une produciton
à partir de gaz si la durée de fonctionnement du
réacteur est supérieure à 5800 heures par an si le
coût du financement est de 8 % par an, supérieure à
3200 heures si le coût du financement est de 4 % en monnaie
constante. On peut voir ici un tableur permettant à chacun de calculer le
coût du nucléaire. Il est donc normal que des centrales nucléaires ne tournent pas tout le temps pour répondre à la demande française et ce sera d'autant plus vrai que l'on voudra davantage diminuer nos émissions de CO2. Pendant les périodes à la consomation est relativement faible on pourra exporter de l'électricité, dans la limite des capacités de transport vers l'étranger. Mais, comme on l'a dit plus haut, il faudra faire attention à ce que cette possibilité n'augmente pas le prix de l'électricité sur le marché français. Donc, vouloir diminuer les émissions et, en
même
temps, parler de gaspillage devant des centrales nucléaires
à
l'arrêt est incohérent.
Certains rêvent de faire de l'Europe une "plaque de
cuivre", un espace géographique où
l'électricité circulerait sans contrainte comme sur une
plaque parfaitement conductrice. Ceux qui en rêvent sont ceux qui
voudraient profiter au maximum de l'électricité
nucléaire produite en France, c'est-à-dire les
consommateurs des pays voisins et, surtout, les intermédiaires
entre les producteurs français et ces consommateurs, les
négociants en électricité. On trouve aussi ceux
qui font la promotion (pour des raisons idéologiques ou,
très concrètement, pour leur intérêt
personnel) des énergies renouvelables : il faut bien pouvoir
évacuer les quantités d'électricité
excédentaires lorsque le vent souffle alors que la demande
d'électricité est faible. D'autres encore sont fort
intéressés. Les constructeurs et gestionnaires de
réseaux de transport, bien sûr. Il y a aussi les tenants
systématiques de la concurrence et du marché ; selon eux,
seul un marché parfait, c'est à dire libre de contrainte,
peut conduire à un optimum. On a montré que leur
thèse, dans le cas de l'électricité, est fausse.
Il
y aussi les "Européens" sincères mais mal
informés sur l'économie de l'électricité,
qui pensent que l'Europe ne peut exister qu'avec un marché de
l'électricité sans contrainte ou encore, version
symétrique, qu'il ne peut pas y avoir de politique nationale de
l'électricité. Il s'agit souvent d'un réflexe : il
ne peut pas y avoir d'Europe sans "réseaux" ; un réflexe
si fort, parfois, qu'il interdit la réflexion. Mettons de côté les motifs idéologiques du
genre "l'Europe-l'Europe !" ou "si le marché concurrentiel ne
donne pas de bons résultats, c'est qu'il n'y a pas assez de
marché" ou purement mercantiles. Les interconnexions sont évidemment utiles pour tirer
parti du fait que les pointes de consommation dans deux régions
voisines n'interviennent pas en même temps. Elles sont utiles
également pour pallier à une panne grave du
système de production dans un pays. Mais, si un pays veut se
doter d'une très grosse capacité d'éoliennes, on
voit mal pourquoi les pays voisins devraient accepter de financer des
interconnexions coûteuses pour recevoir sans préavis et
sans en avoir besoin des quantités excédentaires à
très bas prix et au risque de désarticuler leur
marché de l'électricité. Si la France
décidait elle aussi d'avoir une forte capacité
éolienne et photovoltaïque, ces lignes d'interconnexins lui
donneraient la possibilité physique d'exporter. Mais encore
faudrait-il qu'elle ait des clients car, si le vent soufle fort et si
le soleil brille en France, il en sera de même dans les pays
voisins qui, eux aussi, auront de fortes capacités
éoliennes et solaires. La capacité nucléaire est aujourd'hui de 63 GW.
Comme le montrent les simulations que tout un chacun peut faire sur ce
site, il est possible de diviser les émissions par trois
sans
que cela coûte trop cher en augmentant la capacité
nucléaire. De combien ? Ecrit en 2016 : la programmation doit également tenir
compte des capacités de production dans les autres pays de l'UE.
Aujourdhui, du fait du ralentissement économique et de
l'augmentation massive des capacités éoliennes et PV, il
y a une surcapacité de production, ce qui a un effet
désastreux sur les prix. Ecrit en 2018 : pour comparer un parc de production avec peu
d'éolien et de solaire et d'autres où éolien et
solaire ont une grande part, on ne peut pas utiliser les "monotones" de
production et de consommation. Il faut passer par des simulations qui
équilibrent heure par heure la consommation
d'électricité et la fourniture, production et
déstockage. Quelles que soient les prévisions de
coût des éoliennes et du PV, un parc sans éoliennes
ni PV est moins coûteux qu'un autre qui leur laisse une large
place. En effet, pour équilibrer fourniture et consommation, il
faut une surcapacité de production intermittente, des moyens de
stockage ou des moyens de production complémentaire dont le taux
de fonctionnement est médiocre. Un modèle de simulation
simplifié est publié ici ; l'utilisateur pourra y
introduire ses propres hypothèses. Voir ici. Sur la place du
nucléaire, voir ici. Voir aussi : "qui ne veut pas d'une augmentation de la
capacité nucléaire, d'étranges convergences".
Dans un contexte où l'on voit se mettre en place un
début de lutte contre les émissions de CO2, on peut
s'étonner d'entendre une secrétaire d'Etat parler d'un
impôt sur l'électricité nucléaire - à
l'image de ce qui se dit en Allemagne. Cet impôt se justifie pour
récupérer la marge que
réaliseront les fournisseurs d'électricité qui
achètent de l'électricité nucléaire au
coût de production et la revendent sur le marché
concurrentiel à un prix très supérieur. Et cette
marge sera d'autant plus importante que la lutte contre les
émissions se renforcera. Conclusion paradoxale : la lutte contre
le CO2 augmente l'impôt sur l'électricité
nucléaire ! Paradoxale en effet ; cela montre à quelle
aberration conduit l'ouverture d'un marché concurrentiel de
l'électricité. Car, si le prix de
l'électricité nucléaire augmente, les
consommateurs seront moins incités à l'utiliser alors que
c'est un très bon moyen d'éviter des émissions de
CO2. Comment éviter ce paradoxe ? On peut lire une
page sur la
fiscalité de l'énergie.
Nucléaire
et éolien pendant les pointes de consommation : -
Lorsque
l'écran de
la salle de contrôle du centre de Saint-Denis a franchi les
100.000 Mégawatts à
la fin du mois de janvier 2012, l'électricité
était ainsi produite : Nucléaire
: 63% / Gaz : 3% / Eolien : 4% / Fioul et moyens
de pointe : 5 % / Charbon : 5
% / Hydraulique : 13% / Autres : 6% / Importations : 6%.
- Trois heures
avant, à 16h,
qui correspond à une
heure creuse, le mix était le suivant : Nucléaire
: 70% / Gaz : 4% /
Eolien : 4% / Fioul et moyens de pointe : 2% / Charbon : 5 % / Hydraulique 8% / Autres : 7 %
/ Importations : 4%
Le
calcul du coût de
production
d’électricité par un EPR
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y |
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Note écrite en mai 2016 :
On peut voir aussi de courts extraits de Moins de CO2 pour pas trop cher (L'Harmattan 2012) et de Avec le nucléaire (Le Seuil 2012) Comparaison
entre un régime
d'acheteur unique et le
régime de l'électricité en France jusqu'à
l'ouverture du marché Points communs : Différences Comparaisons
entre un régime d'acheteur unique et la situation actuelle en
Europe
Le prix de vente en gros, en
France, dans un régime
d'acheteur
unique : Aujourd'hui, la capacité de
production est très excessive ; donc les prix sont trop bas.
Dans le régime de l'acheteur unique, celui-ci calcule ce que
seraient les prix en période de pointe, semie-base et base et,
à chaque instant, porte les prix de vente à ce niveau :
c'est le tarif. On pourrait décider de donner aux opérateurs privés la possibilité d'acheter en bourse, ceux-ci verseraient à l'acheteur unique une "contribution pour la sécurité d'approvisionnement durable en électricité", la CSADE, égale à la différence entre le tarif et le prix payé en bourse.La CSADE, rendue nécessaire par la surcapacité en éolien et PV en Europe, sera évidemment beaucoup plus légitime que la part de la CSPE ou des taxes analogues dans les autres pays qui ont suscité cette surcapacité ! L'acheteur-vendeur unique peut exporter ou
vendre en bourse sans contrainte de prix. |
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Le
régime de l’électricité : le système
européen,
ou bien des systèmes centralisés par pays Courts
extraits de Avec le
nucléaire et de Moins de
CO2 pour pas trop cher Voici ce que l’on pouvait écrire il y a une douzaine d’années : des extraits de Moins de CO2 pour pas trop cher – propositions pour une politique publique de l’énergie (L’Harmattan, 2012) et de Avec le nucléaire – un choix réfléchi et responsable (Seuil 2012). Personne n’imagine que l’on construira deux réseaux de transport ou de distribution d’électricité concurrents. Le transport et la distribution d’électricité sont des « monopoles naturels ». Nous traitons donc ici de la production et de la fourniture d’électricité, non du transport ni de la distribution. La propriété remarquable d’un parc de production d’électricité adapté à la demande Supposons que des producteurs d’électricité à partir de gaz fassent concurrence à d’autres qui produisent de l’électricité nucléaire. Comment le prix s’établira-t-il ? Lorsque la demande est inférieure à la capacité de production nucléaire, la concurrence entre les producteurs aura comme effet d’abaisser le prix à un niveau proche du coût de fonctionnement des centrales, soit 10 €/MWh. Mais lorsqu’il faut, pour répondre à la demande, faire fonctionner en même temps les centrales nucléaires et des centrales au gaz, ceux qui produisent de l’électricité à partir de gaz la feront payer au moins au prix du gaz qu’ils consomment pour la produire, disons 60 €/MWh électrique, sans compter de « coût du CO2 ». Il n’y a aucune raison pour que les producteurs nucléaires la fassent payer moins cher, de sorte que la différence entre ce prix et le coût de fonctionnement des centrales nucléaires, leur permettra de financer leurs investissements de production. Lorsque la demande est tellement forte que les moyens de production ne suffisent pas à y répondre, le prix monte aussi haut que les consommateurs sont prêts à le payer (plusieurs milliers d’euros par MWh). Ces prix très élevés, pendant quelques heures par an, contribuent au financement de tous les moyens de production. Le parc de production adapté à la demande[1], c'est-à-dire celui qui procure l’électricité la moins coûteuse, possède une propriété remarquable. Le paiement au prix de marché permet à chaque fournisseur de couvrir l’ensemble de ses coûts, fixes et variables. En payant à chacun, à chaque instant, le même prix, celui-ci étant égal à un coût variable de production, les consommateurs paient à chaque producteur ses coûts variables et ses coûts fixes - et pas plus. Cela n’est vrai que si le parc est adapté à la demande. Si la capacité nucléaire est supérieure à la capacité optimale, les producteurs ne pourront pas payer intégralement l’amortissement des centrales, y compris la rémunération de leur financement. Au contraire, si la capacité nucléaire est inférieure à la capacité optimale, la vente au coût marginal procurera aux producteurs d’électricité nucléaire des rentes dont le montant est très impressionnant. C’est ce que l’on appelle la « rente nucléaire ». Lorsqu’il y a une rente, cela signifie que la capacité nucléaire est insuffisante. Par ailleurs, la concurrence ne permettra pas de gérer efficacement un parc de production nucléaire. L’expérience d’EDF montre que quelques dizaines de réacteurs nucléaires peuvent assez bien suivre les fluctuations quotidiennes de la demande : pour épouser la demande, on a vu au début de l’année 2011 une baisse de puissance de 8 GW suivie d’une remontée égale, le tout en dix heures. Il a fallu pour cela agir de façon concertée sur un grand nombre de réacteurs. Comment imaginer que ce serait possible s’il y avait plusieurs producteurs d’énergie nucléaire en concurrence les uns avec les autres ? Ajoutons que les millions de petits consommateurs ne sont pas en mesure de mettre efficacement en concurrence plusieurs fournisseurs d’électricité. L’expérience des télécommunications a montré en effet à quel point les fournisseurs sont habiles à présenter des offres commerciales et tarifaires tellement complexes qu’il est impossible de les comparer. Il est donc préférable que le prix à la consommation finale soit fixé par l’administration sous forme d’un tarif public qui sera différencié selon les profils de consommation. Il y a probablement un intérêt à faire jouer entre les entreprises qui fournissent l’électricité à la consommation finale une certaine concurrence à condition qu’elle soit bien encadrée. En effet, l’électricité est une forme d’énergie parmi d’autres. Elle sera utilisée de la façon la plus efficace si elle entre dans une gestion qui prend en considération les possibilités d’économie d’énergie et d’autres formes d’énergie (biomasse, solaire, fioul ou biofioul…). Chaque cas doit être étudié spécialement. La concurrence entre les fournisseurs les incitera à proposer les modes de consommation d’énergie les mieux adaptés à chaque situation. L’analyse et l’expérience démontrent donc que le marché concurrentiel généralisé n’est pas le bon modèle économique pour l’électricité mais qu’il est possible et utile de recourir à la concurrence sur certains segments et dans un cadre bien maîtrisé. C’est pourquoi la France a résisté tant qu’elle a pu à la pression exercée par les autorités de l’Union européenne pour l’ouverture d’un marché concurrentiel de l’électricité. Elle a réussi à conserver un tarif public d’électricité pour les petits consommateurs et, avec la loi NOME (nouvelle organisation du marché de l’électricité), elle ouvre avec précaution une certaine concurrence entre les fournisseurs d’électricité. Aussi longtemps qu’EDF avait le monopole de production, l’électricité a été vendue selon un tarif connu des électriciens du monde entier, le tarif « à la Boiteux[2] ». Ce tarif imite ce que donnerait un marché parfait tout en en évitant les excès : les prix très élevés pendant quelques heures par an sont remplacés par un abonnement annuel. Si le parc de production réel est différent du parc adapté à la demande, le tarif est ajusté pour que l’ensemble des recettes couvre les dépenses. Il fournit ainsi aux producteurs des ressources suffisantes pour investir et évite la formation de super-bénéfices. Aujourd’hui, après l’ouverture à la concurrence de l’électricité livrée à l’industrie, ce tarif est applicable seulement aux petits consommateurs sous sa forme de « tarif bleu ». Par souci de simplicité, le « tarif bleu » est assez éloigné de la pureté théorique de ses fondements et n’oriente pas les consommateurs de façon à utiliser de la façon la plus efficace les moyens de production d’électricité. Ceux-ci trouveront intérêt à s’équiper pour réduire leur consommation lorsque la demande d’électricité est forte si les prix sont beaucoup plus élevés pendant les heures de pointe et plus bas dans les heures creuses. Dans ce dispositif, un gestionnaire central de l’électricité met en relation le monde de la production et celui de la consommation d’électricité, qui sont radicalement différents. Il est à la fois « acheteur unique » et « vendeur unique ». Connaissant le marché national, il calcule ce que doivent être les moyens de production en tenant compte d'objectifs d'intérêt général (autonomie énergétique, lutte contre les émissions de CO2, aménagement du territoire) et lance un appel à concurrence pour pouvoir disposer des capacités de production dont il a besoin : il s'engage à payer les coûts fixes indépendamment des quantités qu’il achète et le coût variable des quantités qu'il achète mais ne s'engage pas sur ces quantités. Puis il appelle les moyens de production en fonction de la demande en commençant par ceux dont les coûts variables sont le plus faibles. Les clients du gestionnaire central sont de gros consommateurs ou des entreprises qui vendront l’électricité au détail. Le prix est fixé selon un tarif qui imite ce que donnerait une concurrence parfaite, c'est-à-dire un prix qui dépend du moment et du profil de la consommation et non pas de la façon dont l’électricité a été produite. Mais le tarif évite les défauts d’un marché concurrentiel : les prix très élevés pendant quelques heures par an sont remplacés par une prime fixe payée chaque année. Le prix à la consommation finale est lui aussi conforme à un tarif fixé par l’Etat. Ce tarif est calculé à partir du tarif « sortie centrale », et des coûts de transport, de distribution et de commercialisation. Il fera une grosse différence entre les périodes de pointe de consommation et les périodes creuses. Pour tenir compte de la situation des clients dont les revenus sont très bas, le gestionnaire central de l’électricité peut leur faire une ristourne ; cette ristourne sera forfaitaire, indépendante de leur consommation : le prix au kWh ne sera pas diminué. Cela revient à livrer gratuitement les premiers kWh à certains ménages, au titre de la solidarité nationale. On est un peu confus de pouvoir présenter ce dispositif en si peu de mots. C’est certainement trop simple pour les cabinets de conseils en gestion qui s’activent un peu partout dans le monde pour promouvoir des marchés ouverts et concurrentiels de l’électricité et proposer leurs services pour les mettre en place. Un dispositif serait encore plus simple, celui qui a procuré à la France pendant les décennies qui ont suivi la Libération une électricité sûre et bon marché, un monopole de production d’électricité. Pourquoi ne pas y revenir ? « Acheteur unique » ou « libre jeu du marché » ? Outre sa simplicité, le système de l’acheteur vendeur unique présente un autre grave défaut : il n’est pas conforme à l’idée dominante sur les vertus du marché. Mais ce défaut tend à devenir moins rédhibitoire depuis la crise économique et au vu de l’expérience vécue en Grande Bretagne, qui étudie une formule proche de l’acheteur unique après avoir été pionnière du marché concurrentiel, et dans plusieurs des Etats des Etats-Unis. Ce système de gestionnaire central de l’électricité diminue le risque commercial auquel sont confrontés les producteurs d’électricité, ce qui devrait abaisser les coûts de production. Le gestionnaire central fixe des prix en relation avec les prix de revient en évitant les super marges d’oligopole. Il lui sera facile d’intégrer les objectifs d’intérêt général (CO2, prise en compte du long terme). Les coûts de production seront maîtrisés grâce à la mise en concurrence des producteurs. Le tarif incitera les consommateurs à mieux utiliser la capacité des moyens de production. Les fournisseurs d’électricité se feront concurrence non pas sur les prix, puisque leurs prix d’achat et leurs prix de vente seront fixés par l’Etat en fonction des profils de consommation, mais sur la qualité du service, en particulier leur aptitude à proposer la meilleure façon d’utiliser ou d’économiser l’électricité et de la combiner avec d’autres formes d’énergie. Certes, dans ce dispositif EDF fera moins de profit que l’ont espéré ses actionnaires, persuadés qu’un jour ou l’autre, toute l’électricité qu’elle produit serait vendue au coût de l’électricité des centrales au gaz ou au charbon, y compris le coût du CO2. Quand donc les consommateurs exerceront-ils une pression suffisante auprès des élus pour réunir les conditions d’une production d’électricité sûre et peu coûteuse ? Politique nationale de l’électricité et politique européenne L’énergie touche à la fois
à
l’économie, à la cohésion nationale, à la
sécurité publique. Il n’est donc pas
surprenant de lire à son propos dans les traités sur
l’Union européenne des
dispositions pouvant paraître contradictoires. Il y est dit que
la politique de
l’Union promeut l’interconnexion des réseaux
énergétiques et confirme « le
droit d’un Etat membre de déterminer les conditions
d’exploitations de ses
ressources énergétiques, son choix entre
différentes sources d’énergie et la
structure générale de son approvisionnement
énergétique »[3] La décision des Allemands de sortir du nucléaire en une dizaine d’années, prise sans aucune concertation avec les autres pays de l’Union européenne, est conforme au droit européen. Comme les modes d’approvisionnement en énergie ne seront pas partout les mêmes, les moyens les plus efficaces d’éviter des émissions de CO2 seront différents d’un Etat membre à l’autre. Vouloir « rattraper son retard » en se comparant à un autre Etat membre n’a tout simplement pas de sens. (...) Il pourrait donc y avoir dans l’Union européenne plusieurs marchés de l’énergie avec des prix de l’électricité et du carburant différents. Ces marchés communiqueraient entre eux par des lignes électriques « d’interconnexion » dont la capacité serait calculée pour utiliser au mieux les moyens de production et se porter secours en cas de besoin. La coopération serait alors beaucoup
plus
facile qu’aujourd’hui, au sein de chacun de ces marchés et entre
eux. Elle
prendrait une forme spécifique qui respecterait la
responsabilité des Etats- Pour accepter l’idée de plusieurs
marchés de l’énergie, il faudrait un changement complet
de politique européenne
qui fasse de la concurrence et du marché non un but mais un
moyen. Ironie de
l’histoire, on a vu les Britanniques, eux qui avaient été
les promoteurs de
l’ouverture du marché de l’électricité, proposer
en 2011 de revoir cela de fond
en comble et théoriser pour démontrer l’efficacité
d’un dispositif qui
ressemble comme un frère à celui qui, en France, pendant
des décennies a fourni
aux consommateurs et aux entreprises une électricité
sûre et bon marché. Les
esprits convergent vers l’idée d’un régime fortement
centralisé. Plusieurs
variantes sont possibles. Verra-t-on renaître l’acheteur-vendeur unique d’électricité ? Voici une option, purement théorique aujourd’hui. Un organe public dépendant de l’Etat a le monopole de la vente d’électricité sortant des centrales. Il la vend à de gros consommateurs ou à des fournisseurs qui la vendront eux-mêmes aux consommateurs finaux. Cet organe n’achète pas d’électricité. Il achète des capacités de production. Pour les acquérir aux meilleures conditions, il fait un appel d’offre. Il paie les frais fixes de production (ceux qui ne dépendent pas des quantités produites tels que les investissements et les frais de gestion) et les dépenses directement liées aux quantités d’énergie qu’il commande. Le prix auquel il vend l’électricité est modulé en fonction du moment où elle est vendue de façon à inciter les usagers à éviter les pointes de consommation. Il imite ainsi ce que donnerait une concurrence parfaite, mais en en évitant les excès. Dans ce dispositif, l’organe central paie les producteurs selon des modalités qui répondent à leurs contraintes (un loyer pour financer l’investissement et le coût de l’énergie). Le prix qu’il paie est différent selon le mode de production de l’électricité mais ne dépend pas du moment où elle a été produite. Le prix auquel il vend l’électricité, lui, ne dépend pas de la façon dont elle a été produite mais du moment où elle est vendue. L’organe central unique connaît beaucoup mieux la demande globale que chaque producteur d’électricité ne peut connaître la sienne dans un marché concurrentiel. Le parc de production est adapté à la demande alors que dans un marché concurrentiel la capacité de base est insuffisante, ce qui crée des super marges aux dépens des consommateurs. Le parc peut être calculé en tenant compte de la politique de lutte contre les émissions de CO2 ou, ce qui revient au même, d’autonomie énergétique : il suffit de la calculer en donnant au gaz ou au charbon consommé pour produire de l’électricité un prix qui reflète cet objectif – de l’ordre de 60 € /MWh de gaz. Le parc de production nucléaire peut être géré de façon à suivre efficacement les fluctuations de la demande, ce qui serait impossible s’il était aux mains d’entreprises en concurrence. Les producteurs d’électricité ne courent pas de risque économique puisque l’organe central leur paie les coûts fixes et le coût variable de l’électricité produite. Cette sécurité abaisse le coût de financement des investissements : si le coût de la ressource financière est de 4% en monnaie constante au lieu de 8 %, le coût de l’électricité nucléaire est diminué de 30 %. Le prix est directement relié au coût de production même si le parc de production n’est pas parfaitement adapté à la demande, alors que dans un marché concurrentiel il suffit que la capacité nucléaire soit légèrement inférieure à l’optimum pour que le prix moyen devienne très supérieur au coût de production. Le système centralisé évite les dépenses de publicité et les dépenses commerciales inévitables lorsque plusieurs entreprises sont en concurrence, et payées par les consommateurs. Le système centralisé évite également les dépenses de régulation, contrôle et contentieux. La pression de la concurrence ne peut pas être favorable à la sûreté nucléaire. Sur ces neufs motifs, sept concourent à limiter la hausse du prix de l’électricité. |